Le samedi 15 août 1992, vers 13 heures, le surveillant principal Francis Caron est agressé par un détenu à « haut risque », alors qu’il vérifie la solidité des barreaux des cellules de son étage avec une barre métallique.
Le détenu le frappe dans le dos à maintes reprises avec un couteau artisanal puis s’empare de la barre de sondage afin de lui porter plusieurs coups sur la nuque.
Le détenu, en détention préventive, était incarcéré à la prison de Rouen Bonne-Nouvelle pour le meurtre d’un SDF perpétré en 1990 ainsi que celui d’une greffière du TGI du Havre en 1991.
Dès l’annonce du décès de Francis Caron, survenu le lundi 17 août au CHU de Rouen, les surveillants déposent les clefs, se rassemblent devant la grande porte, portant brassards noirs et bannières en hommage à leur collègue.
Une centaine d’établissements pénitentiaires se mettent en grève en signe de protestation. Le mouvement des surveillants durera près de trois semaines.
Les revendications portent sur l’isolement des détenus dangereux et un supplément d’effectif.
Ils parviennent à obtenir la création de 230 postes supplémentaires, la mise en place d’un protocole de vérification du barreaudage des cellules rendant obligatoire la présence d’un second surveillant ; le transfert d’un tiers des détenus dits dangereux, et l’obtention d’un système d’alarme individuelle perfectionné.
La cour d’assises de la Seine-Maritime a reconnu en avril 1995 StĂ©phane Delabrière responsable de ses actes, et l’a condamnĂ© Ă la rĂ©clusion criminelle Ă perpĂ©tuitĂ© pour deux meurtres et un assassinat, conformĂ©ment aux rĂ©quisitions de l’avocat gĂ©nĂ©ral Françoise Albertini.
Les surveillants de Bonne-Nouvelle reprennent le travail, lorsque, le 11 septembre suivant, le surveillant principal Marc Dormont est tué par balles en tentant d’empêcher l’évasion de neuf détenus armés à la maison centrale de Clairvaux.
À Rouen, les surveillants bloquent l’établissement en signe de deuil et de protestation.
Francis Caron est né le 23 mai 1956 à Marles les Mines (62), il était marié et père de trois enfants. Son CAP d’ajusteur mécanicien en poche, il entra dans l’administration pénitentiaire en 1977.
Il commença sa carrière à la maison d’arrêt de Dieppe, et à la fermeture de celle-ci, il fut nommé surveillant principal à Bonne-Nouvelle. En 1991, il reçut une lettre de félicitations du directeur de l’administration pénitentiaire « pour avoir fait preuve de perspicacité et de conscience professionnelle » lors d’un incident en détention.
Sa hiérarchie disait de lui à l’unanimité; « travail sérieux, discrétion et efficacité ».
Il est cité à l’ordre de la Nation et reçoit à titre posthume les insignes de chevalier de la légion d’honneur le 18 août 1992.