Toulouse – Explosion assourdissante d’une grenade puis entrĂ©e en force d’une quinzaine d’hommes: les ERIS, corps d’Ă©lite de l’administration pĂ©nitentiaire, ont “libĂ©rĂ©”, lors d’un exercice, la prison dĂ©saffectĂ©e Saint-Michel Ă Toulouse de ses “dĂ©tenus retranchĂ©s”.
Créées en 2003, les ERIS (Équipes rĂ©gionales d’intervention et de sĂ©curitĂ©) dĂ©fileront pour la première fois le 14 juillet sur les Champs-ÉlysĂ©es.
Basées à Bordeaux, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Paris, Rennes, Strasbourg et Toulouse, elles comptent 344 membres et ont succédé au GIGN et au RAID appelés dans les prisons.
Les ERIS ont six missions principales (15.000 opĂ©rations effectuĂ©es depuis la crĂ©ation), notamment le maintien de l’ordre en cas de mouvement des dĂ©tenus (91 en 2016), les escortes des personnes dangereuses (550 en 2016), les fouilles des cellules…
Dans un monde carcĂ©ral de plus en plus violent avec une moyenne d’une “agression par jour contre les gardiens”, selon le patron des ERIS Ă Toulouse qui a requis l’anonymat, le danger peut ĂŞtre partout.
“RĂ©cemment, on a accompagnĂ© un dĂ©tenu radicalisĂ© aux obsèques de son père Ă NĂ®mes. Il avait un contrat sur sa tĂŞte et il y avait un risque d’Ă©vasion. On Ă©tait noyĂ© en territoire hostile avec des hommes en djellaba qui pouvaient cacher une arme”, raconte David, un chef de section de 35 ans.
Hors mission, les membres des ERIS, des anciens gardiens sĂ©lectionnĂ©s drastiquement puis formĂ©s pendant dix semaines par le GIGN, s’entraĂ®nent.
Pour les exercices, comme avant chaque intervention, tout commence avec la rĂ©union “SMEP” (situation, mission, exĂ©cution, place du chef). Cette fois, il s’agit de dĂ©loger huit “plastrons” (surnom des faux dĂ©tenus) retranchĂ©s, hurlant et balançant tout ce qu’ils trouvent.
Après sommation, le chef de section donne le top: “Go! go! go!”, crie-t-il.
Une grenade de dĂ©sencerclement explose et ses hommes, cagoulĂ©s, tout de noir vĂŞtus avec ERIS inscrit sur le dos, investissent un couloir en file indienne protĂ©gĂ©s par des boucliers. Au bout, dans une pièce, ils interpellent et sortent un Ă un les “insurgĂ©s” menottĂ©s. Enfin, ils ratissent pour vĂ©rifier que personne n’a Ă©tĂ© oubliĂ©.
“C’est le rouleau compresseur. Notre but est de rĂ©cupĂ©rer les dĂ©tenus et d’Ă©viter tout accident”, explique le capitaine MichaĂ«l.
CritiquĂ©es par le passĂ© pour leur violence et condamnĂ©es par la justice (arrĂŞt de la Cour europĂ©enne des Droits de l’homme le 20 octobre 2011), les ERIS filment dĂ©sormais leurs interventions. “Les camĂ©ras ont fait descendre la pression”, souligne le commandant Patrice.
En 2006 Ă Paris, 2011 Ă Toulouse et 2015 Ă Lyon, les ERIS ont Ă©tĂ© renforcĂ©es par des unitĂ©s cynotechniques. Notamment pour les fouilles. D’autres suivront.
Pour les chiens, le scĂ©nario est immuable. Leur maĂ®tre leur enfile le harnais de travail. Puis l’animal, selon sa spĂ©cialisation, part Ă la recherche d’explosifs, d’armes ou de drogue et d’argent.
Pour Gina, des munitions et un chargeur d’un pistolet ont Ă©tĂ© dissimulĂ©s dans deux cellules, notamment dans un trou comblĂ© Ă plus de 1,50 m de haut.
Elle renifle partout, saute dans un lavabo, gratte le mur. “C’est bien ma louloute”, l’encourage Marie, sa maĂ®tresse. C’est un jeu pour l’animal qui reçoit en rĂ©compense, son “doudou”, une sorte de boudin en plastique, lorsqu’il a trouvĂ©.
“Il y a quelques annĂ©es, on effectuait des fouilles gĂ©nĂ©rales. On est passĂ© Ă des fouilles sectorielles. On cible”, explique Cathy, l’officier cynophile de Toulouse.
Dans ce cas, les prisonniers sont sortis de leur cellule par surprise, menottĂ©s et installĂ©s dans des locaux d’attente par les ERIS.
Drogue, tĂ©lĂ©phones en nombre, batteries, chargeurs, armes… : ces opĂ©rations donnent de bons rĂ©sultats. “Un jour, Ikky s’est accrochĂ© Ă la porte des toilettes d’une cellule. Une cache avait Ă©tĂ© creusĂ©e en dessous”, tĂ©moigne Émilie, 29 ans, maĂ®tre-chien.
Grâce au flair, il y a parfois des trouvailles inattendues: de la “drogue dans des packs de lait ou paquets de cĂ©rĂ©ales hermĂ©tiquement fermĂ©s”, “des objets dans un moteur de machines Ă cafĂ©”, se souvient StĂ©phane, 43 ans, assistant maĂ®tre-chien.